je n’ai ni talent particulier, ni aptitude spéciale
je n’ai rien créé, rien inventé
n’ai fait que reproduire par réflexe mémoriel
que dupliquer par accumulation de savoir-faire
j’ai tout fait, je n’ai rien fait
j’ai tout vu, je passais masqué
j’ai tout eu, j’ai tout perdu
entailles sur vestiges anonymes
j’ai parlé une floraison de langues
abordé une foison d’us et coutumes
de religions et cultes, récits et mythes
l’humanité un réseau de pensées
pratiqué tous les métiers, exercé toutes professions
occupé toutes fonctions, j’ai été guide, voleur, baron
j’ai taillé des pierres pour bâtir des cathédrales
hanté des châteaux, monté des huttes
j’ai été poète à mes heures, musicien, danseur
j’ai fréquenté les bars, j’ai traversé des jungles
gravi des montagnes, piétiné des plateaux
traces discontinues de ma présence transitoire
j’ai été esclave et marchand d’esclaves, geôlier
prisonnier, soldat, trafiquant, fermier
j’ai fabriqué des papyrus, j’ai été moine scripteur
astrologue, alchimiste, devin, j’ai cotoyé des mages
j’ai vu des pyramides sur tous les continents
j’ai navigué sur toutes les mers, sous tous les cieux
compté les étoiles, maîtrisé les constellations
et j’ai tué parce que je ne mourais pas
j’ai escaladé les escaliers arrogants des palais sumériens
je me suis délecté dans les jardins ensorcelés de Babylone
j’ai été l’étranger à la peau sombre aux pays du soleil levant
et parmi mes semblables dans les grands déserts aveuglants
j’ai chanté mon amour du monde
dansé dans des steppes obsédées d’anges
parlé aux arbres avec les géants des mondes perdus
mais je ne vieillissais pas et il me fallait quitter
partir toujours partir
n’ayant pu abuser de mon immortalité
qu’au début du monde, à l’aube des millénaires
mais l’holocène pensait, l’holocène évoluait
je me dispersais à mesure
et longtemps, si longtemps j’ai espéré l’autre
l’ami·e, l’amant·e, l’excentré·e, l’excentric immortel·le
m’alter ego, mon miroir, mon repère, mon île
l’ai cherché·e à la folie le long des ères
sans attache, sans but, je ne suis qu’immortel
lieu commun en circuit fermé dans l’oeil du réel
l’immortalité m’a donné l’insatiable matérialité
elle m’a ravi tout le reste
surement un jour on pourra écrire en 3D et plus dans le Metaverse
Si ce texte t’appartient, tu es un de nos plus grands poètes…même si je sais que ce commentaire nous distancera à jamais (j’espère que ce n’est pas vrai). J’espère qu’on te découvrira un jour, avant qu’il ne soit trop tard pour profiter de ton ‘insight’…’avant-hier’ si possible. Mon cher Jean…tu es de ceux que je relirai un jour, ‘un de ces bientôt’, si le temps m’est accordé, moi qui suis un affreux lecteur. Ta ‘trilogie’ devrait être lue – de force – par tous ceux pour qui la les croyances déshumanisantes l’emportent sur l’Art d’être vivant.
Oui, mon cher Ronald, ce texte m’appartient, comme tous les textes sur ce blogue, sauf les citations comme de raison. Je travaille présentement sur le cinquième volet de l’immortel. Moi, grand poète? Pas sûr. Poète essayiste en tout cas.
je sais plus ou je suis , lisant des tablettes mésopotamiennes , un livre de SF , ou avec un mec un peu barré ah ah mais c’est beau cette page
tiens ! tu as repris le texte en jeu de miroirs ou d’opposition ou … que tu avais délaissé
les trois, tablettes, SF, barré, et bien plus encor
jeu de miroirs ou d’opposition ou…, ça crée du relief, si j’avais une machine à réalité virtuelle j’écrirais des textes en trois dimensions