la page blanche se révèle espace-temps très décapant pour y vivre, je prends la page blanche non pas par surprise, plutôt le contraire, mais pour un trou noir, ossi pour un miroir dans quoi toulmonde se voir
j’éprouve grande misère avec les mots, les mots me viennent difficilement, je n’écris pas aisé, mais j’écris pareil, tuseul dans mon coin, j’écris en franges d’imaginaire, en broderies de rêve, celles-là enlignées au réel du massacre des innocents, celles-ci durement secouées par la réalité des enfants massacrés
j’en suis encor qu’à rameuter mes mots les plus simples et les mots les plus simples s’avèrent les plus énormes, des gouffres dans lesquels nous empilons les enfants en faisant semblant de rien en faisant les occupés en faisant com si on parlait de la température, qu’à planter mes potos sur les chemins de mes comparaisons, qu’à allumer mes lampadaires dans les ruelles de mes métafores, qu’à ériger mon phare sur la mer démontée de mes tours de phrase
je réinvente ma langue, en fait, et je la placarde têtue pernicieuse sur les murs de l’écriture avec l’impertinence de vouloir faire une différence, j’ai du front toultour de la tête, je me prends pour une spirale, j’écris pour les jeunes, pas pour les vieux